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HISTOIRE ET PATRIMOINE

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Remerciements :

Cette rubrique restitue les notes et fiches rédigées par Gilbert Estecahandy au prix d'un minutieux et passionné travail de recherche sur le patrimoine de Moumour et les traces de son passé.

Qu'il soit ici remercié pour cette précieuse contribution à la mémoire du village.

L'implantation d'un lieu de vie, ville, village,quartier, n'est certainement pas le fruit du hasard. Il est le résultat de nombreux facteurs : environnement, proximité d'un point d'eau, qualités défensives, facilité d'accès, personnalités agissantes.

  • NAISSANCE DU VILLAGE DE MOUMOUR

Après la destruction d'Oloron, (Illuro), par les Vikings en 842, un poste de guet a été installé sur le "castera" de Moumour (opidom). Il fallait surveiller le gave, le Vert, la route Bayonne-Somport et celle dite de César, qui longeait le Vert sur sa rive gauche et traversait le bois de
Verbielle (vallée du Vert).


Ce poste de guet s'est petit à petit transformé pour devenir un « château » dont les fondations datent des 10 et 11èmes siècles. Devant ce castet et sur le seul côté facilement accessible, des maisons se sont construites pour abriter les employés et métayers mais surtout pour servir de protection rapprochée du château. Moumour était né ! Ces premières maisons forment le quartier l'embarry, qui vient de "embarrat", c'est à dire l’enfermement. C'était en quelque sorte les remparts du château.

On parle de Moumour au 11ème siècle à cause du seigneur pillard qui habitait le château. En 1212 après la défaite des albigeois, le vicomte de Béarn fut excommunié. Plus tard, pour se faire pardonner, il offrit plusieurs domaines ou faveurs à l’évêque d'Oloron qui ajoutèrent à leur titre, en 1215, celui de Baron de Moumour. C'est ainsi que notre village devint leur résidence d'été jusqu'en 1790.


Origine du nom :

A l'école, on nous apprenait que Moumour, en maure, signifiait « entre deux eaux », ce qui justifiait le nom de notre village situé au confluent du gave d'Oloron et du Vert. Les historiens pensent autrement :
D'après Faget de Maure, Moumour signifierait " montagne des Maures" à rapprocher avec le "turon des maures" à LAY ou à la "fontaine des maures" à Oloron.
D'après P. Tucoo-Chalaa, s'il y a eu des occupants romains, wisigoths ou anglais en Béarn, il n'y a jamais eu d'occupant maure ou arabe.
Pour Michel Grosclaude, Moumour vient de "Mont ", première et deuxième parties.
car toutes les graphies du 13ème et 14ème siècle -"Momor"- permettent de supposer que la première partie du toponyme serait "MONT". Pour la 2ème partie, d°après l'auteur, il est impossible d’y voir l’antroponyme "Maur". Il penche donc pour l'oronyme pré-indo-européen "Mor" (comme Morlanne - Morlaas - Mourenx). Dans ces conditions MOUMOUR pourrait être un doublet composé d'un oronyme pré-indo-européen.
 

L' orthographe restituée : "Momor" localement «Mumu» (prononcée «Moumou») évolue à travers les âges sur divers documents :

1249 et 1308: Castet de "Momor" (actes notariés)
1322 : Montmoo (Charte de Josbaigt)
1385 : Monmor (Recensement de Gaston Fébus)
1727 : Moumou (Archives départementales)
1785 : Moumour (Carte de Cassini)

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Les noms des rues : 

L'EMBARRY : vient de "embarrat": l'enfermement, l'enclos. Les maisons de cette rue servaient de protection au château ; elles l'enfermaient : rue de l'enfermement.

BOULAU : le boulaü, c'est la grosse boule du jeu de quilles et par extension, le lieu où 1'on joue à ce jeu : la rue du quiller.

CARREROT : petite rue.

GUITTE : la rue des canards. La légende assure qu'il y avait des trous importants où les canards pataugeaient.

HARGOUETTE : vient de "hargué", forgeron : rue de la petite forge.

HEAROT : vient de "héadè" bon à faner (pré) : chemin des petits près.

LA SERRE : porte le nom du lieu dit "Serre" signifie colline, hauteur ou mont = chemin de la colline.

BIALE : vient de "Bié", sentier menant au hameau et "bialè" hameau ou domaine à l'écart du bourg. Les premières maisons de ce quartier devaient constituer le hameau du village : chemin du hameau.

COUSTALAT : signifie montée, pente d'un coteau : chemin du coteau.

GOUATS : vient de "goat" ou de "güat", gué. Il y avait un gué, là où se trouve le pont du Gouat.

PETROT : porte le nom du lieu-dit. Vient du diminutif "pètre" qui signifie pierre ou rocher. Il y avait une grande carrière, juste après les dernières maisons, qui a servi à la construction du château et des maisons : chemin de carrière.

LACARRIÜ : vient de "carieü" : chemin ou lit de rivière. Avant la construction des égouts, beaucoup d'eau venant du haut du village, passait par là pour se jeter dans le canal et avait creusé de nombreuses "carieü".

  • LE CAMGRAN

Pendant longtemps, les habitants du Béarn ont vécu de la culture et de l'élevage. Une petite partie des terres utilisées leur appartenait, le plus
souvent en commun mais une grande proportion leur était "affiévée"(1) par leur propriétaire, le seigneur local ou le vicomte de Béarn.

Moumour n'échappait pas à cette règle. Ainsi, ses habitants et ceux de la vallée jouissaient du droit de pacage dans les bois de Josbaigt appartenant à la Vicomté. Ils louaient aussi au seigneur de Luxe les bois de Berbielle et la métairie d'Ilhasse. Ils jouissaient enfin, en propre de deux pièces appartenant à la Vicomte appelées Lasserre et Camgran.


La première a été vendue et parcellisée dans des conditions inconnues mais l'histoire du Camgran est, elle, bien établie : 
Lorsque les évêques d'Oloron ont acquis la baronnie de Moumour en 1215, ils sont devenus propriétaires du château et seigneurs du lieu. Ils
étaient chargés de lever les impôts pour le compte du Vicomte, en prenant au passage, leur quote-part.
Le 29 mai 1491, une sentence rendue par la reine Catherine (2) et faisant loi, cède en affièvement (1) à la communauté des voisins de Moumour,
un bois appelé Camgran(3). Ecrite en béarnais, en voici quelques extraits, traduits en français :
« Nous, Jean, par la grâce de Dieu, roi de Navarre, et Catherine, par la même grâce reine propriétaire du dit royaume...
Vu la demande pressente des jurats, gardes, voisins et habitants de Moumour, qui nous ont démontré le grand préjudice que constituerait pour eux, la perte du bois appelé Camgran.
Ils possèdent en effet un nombre de bétail important mais indispensable pour les aider à vivre et les terres dont ils sont propriétaires ou dont ils jouissent ne suffisent pas pour les nourrir.


Vu la faible ressource que nous en retirons et, voulant faire une faveur au peuple de Moumour.
Affiévons de notre plein gré, en notre nom, celui de nos héritiers et successeurs et pour toujours, le bois appelé Camgran aux habitants de
Moumour, comme c'était déjà le cas.
Ce bois est confronté avec l'eau appelée le Vert, les terres de Labaronne, Laborde, Duhau, et autres.
Les habitants de MOUMOUR ont le droit de pacage, de jour et de nuit, de couper toutes sortes d’arbres, sauf les chênes et hêtres, dans ce bois. Ils
peuvent toutefois couper les branches qui leur sont nécessaires pour faire des cordes appelées "ligadures", ou pour faire des barres, "mailhs"
et autres instruments nécessaires pour rompre, fendre les chênes, hêtres tombés par le feu, le vent ou tout autre incident.
Les habitants du lieu peuvent prendre et couper toutes sortes de fougères avec des petites faux.

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Ils peuvent aussi, comme ils en ont l'habitude, continuer d'affermer le glandage dont ils retirent environ 30 « haux » par an.
Nous nous engageons solennellement à ne jamais plus affiéver ou permettre à nos officiers d'affiéver quelque quantité de terre que ce soit dans ce bois, ni à permettre à aucune personne ou bétail étranger au village d'entrer, passer, gîter, paître de jour et de nuit dans ce bois.
Nous interdisons aux habitants de MOUMOUR, à leurs héritiers et successeurs, de donner, vendre ou affiéver le Camgran, en totalité ou en partie
et octroyons qu'il demeure perpétuellement et à jamais propre vacant de la communauté de MOUMOUR, actuelle et à venir.

La conclusion est la suivante : 

«Pour cet affièvement et toutes les choses susdites, avons promis par les présentes et donné notre parole royale,
de tenir bon et ferme pour nous, nos héritiers et successeurs. Mendons aux notaires qu'ils enregistrent les présentes pour éternelle mémoire. Le
29 mai 1491».


En 1589, alors que les biens saisis au clergé au moment de la réforme n’ont pas été restitués, le capitaine Pène d'Oloron, demande l'attribution, en
raison des services rendus des bois appelés Camgran. La communauté des voisins se mobilise, arguant du fait que cette terre est indispensable à
sa survie et qu'elle n°a jamais cessé de payer son affièvement, comme en font preuve les reçus délivrés par l'Evêque avant la saisie et le fermier du
roi. 

Par la suite,Catherine de Navarre, sœur d’Henri 1V et régente de la vicomté, donnera raison à la communauté de Moumour et confirmera la sentence de 1491.
En 1684,  enfin, Mg de la Salette, se référant à la sentence de 1491, cède de façon définitive le Camgran à la communauté de Moumour, à la

charge et condition, que « les dits jurats voisins et habitants de Moumour, ne pourront en aucun temps vendre et autrement aliéner les dites
terres vagues appelées Camgran et qu'elles seront et demeureront à jamais communes aux dits habitants ››.
Les habitants de Moumour ont donc la charge de conserver, entretenir, faire croître le Camgran, qui ne devra jamais être vendu, aliéné, que ce
soit en partie ou en totalité.

 

(1) « Affiever » : vient de « Fiu ›› une redevance féodale correspondant à un fermage. Le terme est celui utilisé dans tous les documents d'archives.

(2) Catherine de Foix, héritière du royaume de Navarre, vicomtesse de Béarn, comtesse de Foix, Marsan, Gabardan, épouse en 1484, Jean d'Albret qui lui apportait les terres d”Albret, comprenant les Landes, une partie de la Gironde, le Rouergue, le Limousin. Ce mariage faisait d'eux, outre les maîtres du Béarn, les princes les plus possession-nés, les plus puissants du royaume de France, la famille royale exceptée. Leur fils Henri d'Albret, fut le père de Jeanne d'Albret, la mère d'Henri lV.
(3) Camgran: est écrit de cette façon sur tous les documents.

  • LE CHATEAU

Lorsqu'on l'approche par les rues du village, il est invisible. Il faut franchir le portail pour le découvrir au fond de ce qu'il reste d'un très beau parc dessiné et créé par M. Buller et inscrit au patrimoine.

Pour bien comprendre ce qu'il a représenté, il faut le voir d'en bas, en arrivant par le chemin du Vert. Il a gardé, encore aujourd'hui une part de mystère, un côté majestueux et respectable. Perché sur son oppidum rocheux, à l'époque des catapultes, flèches et épées, il était inapprochable, imprenable ; quelle vue, on devait avoir de là-haut, sachant que son aile ouest n'était autre qu'une tour carré de 25 mètres de haut !

L'éperon rocheux sur lequel il a été construit est mentionné pour la première fois au début du 9ème siècle à cause d'un poste de guet qui a été installé dessus, avec des abris pour les guetteurs et leur famille. La peur des envahisseurs (nombreux à l'époque) qui pouvaient remonter par le Gave, le Vert, par la route Oloron - Bayonne très fréquentée par les marchands et les pèlerins, ainsi que par la transversale dite de César courant sur la rive gauche du Vert, nécessitait cette surveillance. 

Les fondations encore visibles, entre le château et l'orangerie, témoignent de la présence au 10ème siècle d'un bâtiment important pour l'époque, construit non plus en bois, mais en dur.

A-t-il été brûlé ? ou détruit ? Toujours est-il qu'au cours des 12ème et 13ème siècles, il a été reconstruit sur les anciennes fondations et à peu près dans la forme que nous lui connaissons, sauf qu'il n'avait qu'un étage et que son aile ouest était constituée d'une haute tour carrée de plus de 20 mètres de haut. Elle offrait une vue parfaite sur les vallées du gave d'Oloron et du Vert. Pour mieux surveiller la vallée de Josbaig, il y avait des postes de guet, de l'autre côté du vert, comme en témoignent les deux guérites toujours visibles au dessus de la propriété Baraillot. Les guetteurs communiquaient à vue et par gestes avec le château. C'était aussi à vue que les renseignements étaient transmis à Illuro (quartier Ste Croix) depuis la tour.

C'est également au 13ème siècle que la tour pentagonale (du même modèle que celle d'Orthez) a été élevée.

Elle mesurait 23 mètres de haut jusqu'au 27 juin 1830, où elle a été frappée par la foudre et abaissée de 8 mètres. L'architecte Latapie dessina et dirigea la construction des pseudos mâchicoulis que nous lui connaissions encore en 1958. Sur ses côtés est, nord et sud s'adossaient les écuries et les bâtiments de remise pour les carrosses, chaises de poste. A sa base, les murs mesuraient 1,30 m d'épaisseur. Le rez-de-chaussée était borgne et servait de réserve à grains. On accédait au 1er étage par un escalier escamotable et aux deux autres par des échelles intérieures.

Les deux tours étaient reliées entre elles par un souterrain. Un deuxième souterrain partait de la tour carrée à l'ouest du château, passait sous la route puis sous le canal. Il sortait sur les bords du Vert (voûte en pierre et maçonnée encore visible), à proximité de la métairie dépendant du château. Ce souterrain permettait la fuite des châtelains, en cas de danger.

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Jusqu'au début du 13ème siècle, il a été habité par des seigneurs successifs dont le dernier (un Moncade). Ce Moncade vivait de rapine et de pillage. Il détroussait les marchands et pèlerins traversant le Béarn et agissait sur une grande échelle puisqu'on parle de lui jusqu'à Bidache. Ces actes répétés ne pouvaient laisser indifférent Bernard de Morlanne, évêque d'Oloron. Il est allé se plaindre auprès de Marguerite de Moncade, régente en l'absence de son mari, Gaston VI qui guerroyait en Espagne. Elle n'a pas hésité à destituer le seigneur de Moumour qui s'est vu dépossédé du château.

A l'époque, les titres de noblesse n'étaient pas héréditaires en Béarn, mais attribués par le prince régnant pour récompenser un fait d'arme ou s'attacher les services d'un haut personnage.

Le début du 13ème siècle connaît l'hérésie et la guerre des Albigeois, dirigée par le comte de Toulouse auquel s'est allié le roi d'Aragon qui a entraîné à sa suite Gaston VI, prince de Béarn.

De nombreux actes de violences contre l'église furent commis et Rome envoya de nombreux émissaires pour essayer d'enrayer cette « épidémie », jusqu'au jour où Pierre de Castelnau, légat du Pape, fut assassiné par un officier du comte de Toulouse, en 1208. Gaston VI, prince de Béarn, allié du comte de Toulouse fut désigné complice de ces crimes et, excommunié. A l'époque c'était le pire châtiment, l'infamie suprême !

Après avoir fait amende honorable, il œuvra pour se faire réhabiliter au sein de l'église, ce qui fut fait en 1214, grâce à l'intervention de Mgr de Morlanne, évêque d'Oloron. Pour le remercier, Gaston VI lui donna plusieurs domaines dont la baronnie de Moumour.

 

Le château de Moumour va rester sous le giron des évêques d'Oloron jusqu'à la révolution, sauf pendant quelques années au moment des guerres de religions.

Ils vont utiliser le château comme résidence d'été, lieu de repos, de réunions. Ils vont y mener une vie tranquille rythmée par le va-et-vient des carrosses, chaises à porteurs et autres berlines de poste en jouissant bien sûr de tous les avantages s'y attachant : outre le titre de baron, ils bénéficiaient de l'usufruit des métairies, dont celle très belle en face du château, de l'autre côté du Vert. Ils ont fait construire le canal qui faisait fonctionner outre le moulin, un foulon et une marbrerie. Le moulin était de loin le plus important puisqu'il permettait le contrôle de toutes les productions de céréales.

Les Fors de Béarn (4) exigeaient en effet que les habitants du village aillent obligatoirement moudre leur grain au moulin du seigneur, sous peine de se voir confisquer toute leur récolte. L'évêque pouvait ainsi calculer les impôts qu'il levait pour lui-même et le vicomte.

 

Endommagé par les guerres de religions (l6ème siècle), le château sera restauré par Mgr de Révol qui le rehaussera d'un étage et arasera la tour carrée au niveau des autres bâtiments, il construira une chapelle sur la terrasse du portail d'entrée et le bâtiment dit de « l'orangerie », avec sa très belle galerie orientée plein sud.

 

Les murs de la chapelle et de la galerie étaient couverts de peintures représentant «des genres gais» et «des parties à âne» tout comme ceux du choeur de l'église. Elles étaient l'oeuvre du peintre Ribère qui a également décoré les églises d'Arros et de Lucq de Béarn.

Le parc, créé en 1852 par le paysagiste Buller, comportait des essences très rares à l'époque : magnolia - catalpa - tulipier - grenadier... Les allées étaient bordées de buis taillés bas.

 

L'Evêché sera dépossédé du château en 1789. Il sera vendu le 3 mars 1791, à la famille Lamothe-d'Incamps, avec ses dépendances pour la somme de 89 542 livres.

Les nouveaux propriétaires vont y ajouter un deuxième étage, abaisser la tour pentagonale de 8 mètres endommagée par la foudre le 27 juin 1830. Ils vont la doter d'un pseudo mâchicoulis qu'on connaissait encore en 1958. La chapelle sera détruite au 19ème siècle.

Pendant plus de 150 ans, Moumour verra défiler dans ses rues toute la bourgeoisie oloronaise et des environs, venue s'égayer dans le magnifique parc du château, ainsi : le poète Navarrot, l'architecte Latapie (qui a construit les halles et le palais de justice de Pau), M. Bourra, l'architecte qui dirigea la construction des ports de Bayonne.

Les déboires pécuniaires, la guerre, sonneront le déclin du château qui deviendra colonie de vacances puis sera revendu, pillé et laissé plus ou moins à l'abandon.

 

Il a repris vie, il y a une quinzaine d'années, après une complète et soigneuse réhabilitation conduite par de nouveaux acquéreurs sous la forme de chambres d'hôtes de luxe avant d'être cédé à un nouveau propriétaire.

 

(4) Les Fors de Béarn constituent un ensemble de textes juridiques écrits en langue béarnaise entre le XIe et le xve siècle qui firent du Béarn un précurseur en matière de justice et de démocratie.

  • LES DEUX EGLISES

Comme un autre village célèbre, Moumour a eu ses deux églises ; Saint-Jean-Baptiste et Sainte-Hélène, église primitive disparue aujourd'hui.

  • SAINT JEAN BAPTISTE

Histoire de notre église

Grâce à ses fondations, à la meurtrière visible dans la sacristie, nous savons qu'elle a été construite à la fin du 12ème siècle, comme la plupart des églises du Béarn, grâce en partie à l’argent ramené par Gaston IV des guerres contre les musulmans en Espagne.
Elle nous apprend que Moumour, déjà à cette époque, était une communauté importante et structurée justifiant la construction d'une église et surtout pouvant supporter son financement.
Les pierres de la construction proviennent de la même carrière que celle de Sauveterre.
Son toit actuellement en ardoise, était vraisemblablement autrefois en bardeaux.
De forme parallélépipédique, avec un clocher carré couvrant le porche d'entrée, elle possédait jusqu'à la fin du 19ème siècle 4 chapelles latérales : deux dédiées à St Jean-Baptiste et à la Vierge, les deux autres aux âmes du purgatoire et à Sainte-Marie Magdeleine. Ces deux dernières ont été détruites dans les années l890-1900. Leur toiture prenait l'eau et l'argent manquait pour les refaire.
Au milieu du l6ème siècle, comme toutes les églises du Béarn au moment des guerres de religions, elle a été en partie détruite. Elle a été, après la cathédrale Ste Marie, la première reconstruite (1630-l650), Moumour étant résidence d'été des évêques d'Oloron.
Elle a été profondément remaniée en 1750 : construction de la sacristie actuelle pour dégager et agrandir le chœur afin que l'évêque puisse y tenir synodes et y célébrer des ordinations.

Plusieurs historiens parlent d'une entrée latérale réservée aux Cagots, sans autre précision.
Peut-être y avait-il une porte dans l'une des chapelles détruites.

Jusqu'à la loi de séparation de l'Église et de l'Etat en 1905, l'église était administrée par la "fabrique", composée du curé plus 6 marguilliers élus renouvelés par deux tous les deux ans.
Elle établissait et gérait un budget spécial destiné à satisfaire au bon fonctionnement du culte ainsi qu'à l'entretien de l'église et du presbytère.
Les marguilliers présidaient les cérémonies, réglaient les processions, assuraient le maintien de l'ordre. La fabrique a été dissoute le 2 décembre 1906 en application de la loi de séparation du 9 décembre 1905. Tout ce qui existait avant cette date est devenu propriété de la commune qui
s'engageait à laisser tous ces biens à la disposition des fidèles.
Cette passation de pouvoir a provoqué de nombreux heurts et tensions dans le village comme en témoignent les divers compte-rendus de séance de la fabrique. Les deux dernières ont été particulièrement houleuses. Tout l'argent en caisse a été distribué aux pauvres ou à des
œuvres. Les signataires étaient : Casabounet (prieur), Orognen (sous-prieur), Bellocq (porte-croix), Bordelongue (trésorier), Vignes et Talou (conseillers), Licquet (curé).

DESCRIPTION DE L'ÉGLISE

Le visiteur est  accueilli par le patron de notre église : Saint Jean-Baptiste, statue un peu difforme du l9ème siècle.

La tribune est en partie soutenue par des colonnes torses où grimpent deux tiges de rosiers.
Elles sont posées sur deux bénitiers en marbre noir des Pyrénées et datent du l8è siècle. A l'origine  elles devaient faire partie d'un retable ou de l'autel central.

A l'entrée à droite, le baptistère en marbre blanc, hélas scellé dans le mur.
Le chemin de Croix, réalisé par Madame Bonnehene, qui en a fait cadeau à l'église, a été posé en 1872.


Le CHOEUR

Classé, entièrement réalisé en bois peint et doré ; l'autel proviendrait de la cathédrale d’Oloron.
En partie basse, un très beau tombeau. Le tabernacle a été fait par deux frères Tarbais, comme celui de la cathédrale de cette ville.
Sur ce tabernacle, on trouve un enfant roi protégé par deux anges.
Derrière, le baldaquin avec un couronnement porté par 4 colonnes et au centre une très belle gloire : l'esprit saint (la colombe) et au milieu des hommes et au centre du soleil...Tout un symbole !
De chaque côté, deux anges - trompettes.
Les 6 chandeliers sont également en bois peint.
De chaque côté de l'autel, deux très belles torchères en bois sculpté du l7ème siècle, classés par les Beaux arts.
Également sur les côtés, deux bustes reliquaires (sans reliques) représentant, à droite le pape Benoit VIII et à gauche le pape Pi V.
Derrière, 3 statues classées en bois doré du 18ème : à gauche Saint- Pierre, au centre la vierge et l'enfant, et à droite St Paul.
Sur le mur droit, deux fauteuils chippendale (renaissance Anglaise) du 18ème, magnifiquement sculptés dans du bois d'ébène. A côté, deux chaises 19ème.
A gauche une très belle croix de procession en bois doré (l7ème).

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Les PEINTURES

Toutes les toiles, sauf la crucifixion, sont l'œuvre du peintre auscitain de l'école flamande qui signe : « Smeet, Sourd muet ». Toutes sont du 18ème et données à l'église de Moumour par Mgr Montillet, ancien évêque d'Oloron, devenu archevêque d'Auch.

Dans la nef :

La première peinture à droite représente les âmes du purgatoire. Elle nous montre des anges sortant quelques âmes des flammes sous la surveillance de “ l'agneau ”. On trouve la même peinture à la cathédrale de Lectoure (Gers).
Du même côté, un très beau vitrail représentant Saint-Jean-Baptiste (1925).
A gauche : la crucifixion, une copie d”un tableau du l9ème siècle du peintre Pierre Paul Prod'Hon, surtout connu pour son “ triomphe de Bonaparte et un portrait de l’Impératrice Josephine dans les jardins de Malmaison.

Dans le chœur :

A droite :
− l'exaltation de la croix dans un très beau cadre en bois doré,
− l'ange gardien thème très prisé à l”époque de la Renaissance. Les personnages sont tirés d”un tableau de Pierre de Cortone (1596-1669).
 

A gauche : Sainte-Hélène - personnage extrait d”un tableau de Rubens (1577-1640), qui se trouve dans L’église de Grasse. Mère de Constantin, c'est elle qui aurait découvert la croix du Christ. Présentée avec « hermine » tenant la croix, le regard dans le vague.
 

Dernier tableau du chœur : l’éducation de la vierge, Sainte-Anne instruisant Marie sous la protection de l'ange.


Dans la chapelle nord :
- St Jean Baptiste, patron de la paroisse.

Dans la chapelle sud :

- Vierge sortant du tombeau : c’est la vierge de la solitude, entre la mise au tombeau et la résurrection. Le personnage est extrait d'un tableau de Philippe de Champagne (1602-1674), auteur entre autres d'un portrait de Richelieu. Alors que sur le tableau original elle est peinte en buste, Smeet l’a peinte en pied.

- Dans cette même chapelle, l'autel est en bois peint et doré du 17ème.
Sur la gauche : l'Annonciation à la vierge.
Sur la droite : le baptême du Christ par Saint-Jean-Baptiste qui saute de pierre en pierre.
Sur les deux scènes, on trouve une colombe représentant l'esprit saint, très actif dans celle de l'Annonciation.
- Les statuettes de chaque côté du tabernacle sont aussi d'époque et représentent au centre Dieu le Père, à gauche Saint-Paul, et à droite Saint-Marc.
Les quatre chandeliers sculptés sont en bois.
A l'entrée de la chapelle : une statue de la Vierge (19ème) en bois doré.
Dans chaque chapelle, deux confessionnaux du 18ème.

A gauche dans la nef, une chaire du 19ème.

  • SAINTE HELENE

Avant la construction de l’église Saint-Jean-Baptiste, Moumour possédait une chapelle dédiée à Sainte-Hélène sise après le pont du Vert, à gauche de la route en direction d'Orin. Elle serait le plus vieux sanctuaire chrétien d’Aquitaine. Plus qu’une chapelle, elle a été hôpital à la grande époque des pèlerins se rendant à St Jacques de Compostelle ou Rome et, en même temps, église paroissiale pour Moumour et tous les villages de la vallée de Josbaigts. Elle a été aussi lieu important de pèlerinage du Xème au XVème siècle, avec un renouveau au XVIIème. C'est surtout pour ce fait qu'elle est connue dès le Xème siècle. « Le sentiment religieux de cette époque, précise l'historien Laborde en 1920, se manifeste dans la construction de chapelles, monastères, dans les pèlerinages qui portaient les foules vers ces sanctuaires comme la chapelle de Serres-Castet, Sainte-Hélène de Moumour... ».


On venait de loin à Sainte-Hélène, surtout les jeunes mères qui venaient spécialement demander à la Sainte, mère de l'empereur Constantin, abondance de lait pour leur nourrisson.
 

Lors du contrat de Josbaigt, en 1249, les habitants de " Momor", invoquent pour obtenir le droit de pacage dans la vallée, leur appartenance à la "paroisse Sainte Hélène", ce qui leur fut accordé. Qui dit paroisse ne veut pas dire village. A l'époque, aucun village de la vallée ni Moumour, ne possédait d”église : ils dépendaient de Sainte-Hélène.


Les l3ème et 14ème siècles voient se multiplier le passage des pèlerins vers St Jacques ou Rome. Sainte Hélène se trouve sur l'un des itinéraires dits "camis roumiu" même si ce n'est pas l’un des plus importants. Les pèlerins ne comptaient pas leur temps, ils musaient, cherchant les chapelles fréquentées où celles abritant de saintes reliques. Ainsi, après Orthez, au lieu de suivre la grande voie d”Ostabat et Ronceveaux, certains prenaient la route de Sauvelade, puis de Lucq, (2 monastères) et, de là se dirigeaient vers Sainte-Hélène en traversant le gave à Prechacq (par le bac) où se trouvait un "ostau de l'hespitau".


Depuis Moumour, ils pouvaient prendre plusieurs directions : Oloron, Sarrance, Sainte-Christine du Somport, ou suivre la vallée du Vert, vers Arette et le col de Saint-Martin ou enfin, longer le Joos par Notre Dame de Malte (Barcus), La Madeleine (Tardets), et Sainte-Engrace.

En plus d’un lieu de dévotion, Sainte-Hélène fut aussi un "hospital" offrant un abri et un lieu de ravitaillement aux pèlerins qui, le bâton à la main, s'en allaient sur les grands chemins. Ces hôpitaux se trouvaient dans des centres comme Lembeye, Lescar, Orthez, mais aussi en pleine campagne comme Sainte-Christine du Somport ou Sainte-Hélène.
Dans ces maisons, « nuit et jour, on y soignait, nourrissait, couchait quiconque se présentait, homme ou femme, et tous ceux que les serviteurs ramenaient des refuges ou des bords des chemins, fatigués, malades ou blessés, chrétiens ou hérétiques, français maures ou étrangers ».


Un administrateur de ces asiles charitables portait le nom de "Commandeur" ; un ou plusieurs chapelains pourvoyaient aux fonctions religieuses. Les hospitaliers, laïques ou religieux, étaient des deux sexes (frays y sorers, nous disent les textes), pour assurer les soins et l'accueil. Les pèlerins qui le pouvaient aidaient au ménage et à la cuisine pendant leur séjour. Les permanents cultivaient un jardin et élevaient volaille, bétail, porcs...


Sainte Hélène ne figure pas sur le cadastre de l832 où ne se trouve qu”une croix et devait donc être déjà abandonnée et à l”état de ruines. On y célébrait pourtant des offices à la fin du l8ème siècle. Elle est par contre mentionnée sur la carte de Cassini (1780).


 
Comment expliquer le très grand prestige de cette petite église ? Peut-être par le souvenir laissé par sa qualité d’église baptismale dans les premiers siècles de la christianisation à la population de la vallée et de Moumour. Par la suite, la construction d'églises dans chaque bourg l'a rendue inutile. Malgré cela, elle a continué à assumer jusqu'au l9ème siècle toutes ses fonctions, au grand dam des autres églises. 

 

Même si quelques dizaines d'années ont suffi pour en gommer toute trace, elle reste un grand témoignage culturel pour notre village et le souvenir d'un riche passé.

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